Accompagner

La situation de Hikikomori implique des aspects familiaux, des aspects psychologiques individuels, et des aspects sociaux ou sociétaux quand la difficile adaptation du jeune rencontre des obstacles liés au monde de la scolarité et du travail.

Accompagnement

familial

Accompagnement médical,

psychologique et psychiatrique

Accompagnement

social et scolaire

Accompagnement familial

La famille est au premier plan, toujours, puisque par définition le jeune ne peut demander de l’aide, du moins au début. L’attention portée à la famille, sans récuser sa demande car le jeune est absent, constitue la première étape selon les programmes d’aide définis au Japon pour les situations de hikikomori. C’est aussi ce qui ressort aujourd’hui l’expérience générale.

Guidance familiale

La famille souffre souvent elle aussi d’un isolement dans lequel elle se retranche par inquiétude, par lassitude, par envahissement, parfois aussi par honte de cette situation qu’elle vit à la maison avec le jeune. A tel point que les auteurs japonais utilisent le terme de « double hikikomori ».

L’accompagnement de la famille, avant d’entrer en contact avec le jeune, est donc important. Ce n’est pas une psychothérapie, mais plutôt une guidance comme on pratique avec les parents de plus jeunes enfants. C’est une aide à la compréhension de la situation, un recadrage des positions de chacun, parfois en lien avec d’autres expériences vécues, afin de soulager le fardeau de la famille si toutefois celle-ci y est prête. Les moyens utilisés peuvent être les entretiens familiaux en présentiel ou par l’intermédiaire d’un outil de réseau social, Skype ou Whatsapp par exemple.  Peuvent s’ajouter également les réunions dites parfois thérapies multifamiliales.

Y a-t-il des signes d’alerte pour les parents ?

Les signes d’alerte sont l’indication d’une certaine vulnérabilité. Ils ne constituent pas obligatoirement le début d’une situation de retrait/ hikikomori. Les remarquer peut permettre de ne pas laisser la situation s’enliser en croyant juste qu’il faut attendre.

Il peut exister des antécédents familiaux de retrait, pour l’un des parents ou grands-parents. Il peut s’agir d’un simple trait de caractère, mais que le jeune peut imiter. Surtout s’il présente une inadaptation ancienne à l’école, une timidité ou un retrait. Les enfants dits à haut-potentiel sont particulièrement sujets à cette inadaptation.

De petits signes de retrait peuvent être repérés. Il est difficile pour l’entourage familial ou scolaire d’être vigilant et de chercher à réintégrer le jeune, sans pour autant le charger par une énorme inquiétude qui le bloquerait encore davantage. On sera attentif à une diminution des relations sociales dans la préadolescence, mais aussi à une difficulté à exprimer les émotions ou à manifester de l’empathie.

A l’école, l’existence d’une situation de harcèlement peut être victorieusement gérée par l’enfant et l’entourage familial et scolaire. Parfois on ne le sait pas et l’enfant se renferme.

Il est nécessaire de prendre en compte la phobie scolaire ou impossibilité d’aller en classe. L’une des formes de ce trouble est celle d’une situation de retrait, de repli à domicile.

Enfin, l’apparition à l’adolescence d’une addiction au cannabis ou à l’alcool, d’abord festive, puis de caractère solitaire, ne saurait être minimisée.

Une fois la situation installée, quels conseils ?

Les situations ne sont pas toutes les mêmes, cependant il existe quelques lignes force :

  • Cela prend du temps, comme la mise en place de l’enfermement a pris du temps, mais on ne lâchera pas.
  • On ne s’attend pas à un déclic de sortie, comme il n’y a pas eu de déclic d’entrée.
  • En raison du double hikikomori du jeune et de la famille, les parents sont incités à conserver leurs intérêts propres, leurs projets, à ne pas craindre par exemple de changer d’appartement ou de ville quand existe pour eux une opportunité.
  • Le jeune adulte hikikomori, parfois tyrannique et pourtant en situation de dépendance et d’absence d’autonomie, requiert l’attention de ses parents exactement comme un enfant.
  • Revenir sans cesse avec lui sur des questions sur son avenir ne servent plus à rien, elles enferment.
  • Ressasser une culpabilité ancienne, revisiter les détails de l’enfance et s’en accuser est une attitude presque constante, pourtant c’est une immobilisation dans le temps comme celle du jeune.
  • Accepter et même susciter l’intervention de tiers extérieurs, familiaux ou non, selon leur ressenti, sans contrôler leur intervention, sans honte non plus pour les solliciter, est une démarche étonnamment productive.
  • Les temps de séparation, hors du domicile familial, même brefs, sont à favoriser.

Marie-Jeanne Guedj

Accompagnement médical, psychologique et psychiatrique

Plusieurs critères se conjuguent vers une non-demande d’aide psychologique : passivité, dévalorisation de soi, manque de confiance en soi et en les autres, absence de perception de la souffrance, et installation d’une routine dans la situation.

La reconnaissance et l’allègement du fardeau familial modifient l’équilibre. Le jeune peut percevoir insatisfaction et détresse.

Cependant, le début d’une psychothérapie lorsqu’elle fait suite à une injonction des parents, ou comme une tractation ou un compromis pour obtenir autre chose, ne fonctionne pas.

La souffrance corporelle, cause ou conséquence de l’enfermement ?

 La plainte

La souffrance physique est la plus facile à identifier. Qu’elle repose sur un trouble objectivable et de réelles lésions ou qu’elle soit amplifiée comme une plainte hypocondriaque, elle passe d’abord par l’approche globale au cabinet ou à domicile par le médecin généraliste ou une infirmière. Il peut s’agir aussi de la reprise de soins en cours et interrompus. On aurait tort de considérer cette approche comme un élément insignifiant du tableau de repli/ hikikomori.

Orthopédie

Les douleurs de posture, maux de dos divers, sont le signe fréquent de trouble de la statique dorsale tels que la scoliose qu’il est important de diagnostiquer au plus tôt.

Diététique et nutrition

L’obésité et l’hyperphagie, attribuées à la station presque toujours immobile, renforcent l’énervement de tous face à ce jeune qui mange tout seul, n’importe comment, grossit, conduisant à des surpoids de 120 kg avec un indice de masse corporelle à 30. D’une autre manière, maigreur et sélection alimentaire suscitent inquiétude et climat de forte tension.  Ces deux situations nécessitent autant l’une que l’autre un bilan diététique et une prise en charge.

Dermatologie

Ne pas sortir pour ne pas montrer sa peau même si l’acné ou l’eczéma touchent des parties cachées du corps, paraît concentrer sur le trouble dermatologique toute une autre honte face aux autres. La consultation dermatologique apparaît aussi comme une étape dans la prise en charge médicale du jeune.

Addictions

Les addictions à des substances telles que cannabis ou alcool, plus ou moins cachées, entraînent paradoxalement des sorties pour se fournir, mais aggravent l’inertie et la passivité. Elles peuvent constituer une voie d’entrée pour un besoin d’être aidé.

La demande d’aide psychologique et psychiatrique

Quand le jeune accepte de consulter un « psy », c’est pour comprendre ce que font ses parents, c’est aussi qu’il s’intéresse à son fonctionnement mental, pas seulement à celui de ses avatars virtuels. Il peut alors sortir, et même aller loin, seulement pour la psychothérapie. Contre toute attente, ces jeunes sont demandeurs, ils s’intéressent à la découverte de leur subjectivité, même si cela prend du temps. Accepter la durée et le mouvement de la demande même si les avancées sont souvent tardives.

Des symptômes apparents peuvent être traités, cela soulage la souffrance, et renforce la possibilité de relation. Par exemple des comportements comme l’incurie et le désordre, la peur de ses émotions, ou bien les éléments dépressifs sont assez faciles à traiter.

Le recours à Internet qualifié même d’addiction ne peut être l’objet des soins du moins au début, il représente une lutte contre l’ennui qu’on ne peut attaquer d’emblée. On remarque que le développement autodidacte auquel le jeune croit accéder reste souvent en-deçà de connaissances valables sur les sujets et ne permet pas un véritable échange.

Marie-Jeanne Guedj

Accompagnement social et scolaire

Ce volet est à développer avec un réseau de travailleurs sociaux, avec Pôle Emploi, ou des membres de l’enseignement et de l’Université. Des aides sociales existent pour tous les jeunes, par exemple le RSA au-delà de 25 ans qui aide momentanément et permet une inscription dans la vie de la société.

Au cas par cas, des coachs, des professeurs éventuellement retraités, des éducateurs de vie sociale, occupent ce troisième volet de l’aide à la situation de hikikomori. En dehors de la famille, et en dehors du semblant de connaissances par Internet, ils participent à valoriser l’intérêt pour la connaissance.

De même l’accompagnement qui passe par la constitution de groupes d’échanges de jeunes hikikomori, constitue un début de socialisation, appuyé si possible sur des adultes professionnels expérimentés, et permet les échanges sans interruption trop rapide (par peur de la relation à l’autre).

Cette approche serait à renforcer.

Marie-Jeanne Guedj